Entretien avec Paulin Chabet.
Propos recueillis par Loïc Fontfrède en juin 2016.
Paulin : Cela fait, jour pour jour 5 ans que je me suis rendu à la Dibamba sur la tombe de Robert. J’ai senti qu’il y avait une présence. Quand j’ai fouillé, j’ai écouté son histoire. J’ai tout de suite senti qu’il y avait quelque chose qui se passait avec Robert. Dès que je me suis rendu sur sa tombe, j’ai prié, j’ai demandé son intercession. Au-dessus de sa tombe il y a une croix où les pèlerins viennent déposer des chapelets. J’ai été subitement attiré par l’un d’eux que j’ai pris et constamment à la maison je priais avec. J’ai décidé de faire des recherches. Lors d’une semaine d’adoration, on a projeté un documentaire sur Robert et j’ai senti tout de suite la fusion, car comme moi Robert, était un fils de la vierge Marie […]
Il y a 2 années de ça j’étais en train de faire mon chemin de croix dans ma chambre avec Robert Naoussi. Après avoir fini le chemin de croix, j’ai prié le chapelet. Je suis couché dans mon lit. Tout de suite, je sentais ce besoin dans le cœur, besoin d’organisation, de faire un pèlerinage. Comme dans ma paroisse, j’avais un groupe d’intercession tout de suite c’est allé très vite de bouche à oreille, je leur ai dit : ‘’Voilà j’ai comme l’impression que Robert voudrait que je fasse un pèlerinage ». J’ai demandé aux sœurs de prier pour moi. Elles ont confirmé. La particularité du pèlerinage c’était ceci que nous pèlerins nous adressions à Robert une lettre avec une intention difficile pour laquelle chacun nous prions toujours. Nous avons rédigé… Nous avons commencé le pèlerinage. […]
Le premier pèlerinage ce fut le 1er octobre…Un hasard ? Fête de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et par pure coïncidence, jour de la mort de Robert.
Nous sommes allés à la tombe et les intentions ont été brûlées avec de l’encens, nous avons élevé les chants à l’Esprit Saint puis une à deux semaines après, j’ai commencé à recevoir des coups de fil des frères et des sœurs qui ont eu après ce pèlerinage des consolations, des solutions à leurs problèmes. Alors là, je suis allé rencontrer mon prêtre, mon curé de l’époque Eloi Gaby Samet (5’ 20) et je lui en ai fait part il m’a dit ; ”Paulin, tu as mon feu vert’.
J’ai organisé un second pèlerinage puis un troisième…
Avec petit Robert il y a une seule chose : je le sens dans mon cœur : ‘’il est là’’, il continue à intercéder pour nous parce que chaque fois quand je prie je lui demande d’intercéder tout en joignant ses plaies aux saintes plaies du Christ pour l’intention que je lui présente et je suis satisfait.
Loïc : -Quelles sont les grâces qui ont été constatées ?
Paulin : -Les grâces, elles sont nombreuses… C’est un puits de grâce. Par pure négligence, j’ai les larmes aux yeux en donnant cet interview… Si j’avais eu la présence d’esprit depuis l’organisation du premier pèlerinage, j’aurais insisté pour que les frères qui m’appelaient mettent par écrit leur demande d’intercession. J’ai eu le cas de grossesses difficiles qui après le pèlerinage avait une heureuse délivrance. Avant le pèlerinage, les médecins avaient dit que pour qu’elle accouche elle devrait subir une opération chirurgicale pour accoucher. J’ai une sœur qui a vécu deux ans en ménage et avait des problèmes de stérilité. Après le pèlerinage chez Robert, elle a eu la grâce d’enfantement. Elle a accouché du petit Alexis qui se porte très bien. J’ai reçu beaucoup de grâces des frères qui ont maintes fois assisté au pèlerinage.
Loïc : -Pour toi, personnellement, qu’est-ce que la béatification de Robert apporterait au peuple camerounais, à l’église et au monde ?
Paulin : -Pour moi, la béatification de Robert Naoussi, c’est une preuve vivante pour nous, peuple camerounais que nous servons un Dieu qui n’est pas désincarné mais que nous, peuple camerounais, africain en général…
Dieu n’est pas seulement pour d’autres pays et que les saints que nous rencontrons à l’église n’appartiennent pas seulement à d’autres continents. C’est une preuve tangible que le Christ est avec nous et qu’au milieu de nous, nous vivons avec des saints.
Pour la jeunesse, c’est un message que Dieu passe aux jeunes camerounais en particulier africains ou du monde en général de lui faire confiance, de mettre son espérance comme il l’a dit à travers les lèvres de Saint Paul (Romains 8, 24) : ‘’Espérer sans chercher à voir, parce que si tu vois ce que tu espères, ce ne serait plus de l’espérance. Espérer contre toute espérance ‘’ C’est cette espérance que le petit Robert avait en Dieu en demandant à Dieu de le laisser souffrir de ses blessures pour le pardon des péchés des jeunes que nous sommes. Pour nous, ça sera un témoignage que le petit Robert est ce capitaine de la jeunesse qui a pris la matraque pour défricher le chemin, pour lui montrer.
Ce que j’ai oublié de vous dire, c’est que je suis le seul chrétien catholique de ma famille. Je suis issu d’une famille protestante. J’ai été baptisé à l’église évangélique mais aujourd’hui je suis chrétien catholique convaincu parce qu’en regardant l’histoire de Robert, j’ai encore eu la ferme confiance du pouvoir d’intercession de la Vierge Marie. Robert, c’est un modèle et je bénis le Seigneur pour lui.
Loïc : Dans la vie de Robert, quels sont les moments de sa vie qui te touchent, qui t’encouragent dans ta propre vie, dans les épreuves à surmonter et dans les difficultés ?
Paulin : Ce qui me touche dans la vie de Robert ? A l’époque quand Robert souffrait de la lèpre au Cameroun, comme partout ailleurs, les lépreux étaient des rejetés … Le lieu où Robert est enterré aujourd’hui qui était la léproserie de la Dibamba à cette époque, c’était de la brousse. Mais avec Robert, moi je comprends la parole que Dieu dit dans le livre d’Isaïe : « Même si ta mère te rejette, moi je ne te rejetterai jamais ».
Robert, pour les hommes était rejeté mais lui, savait en qui il avait mis sa confiance. Il avait cette joie de porter ses blessures. Ça c’est la première chose. La deuxième étape de sa vie qui m’a beaucoup marqué, c’est la jour de la fête mariale où dit on l’infirmière s’apprêtait à venir lui faire le pansement. Tellement il se tordait de douleur, il a entendu les bruits des chrétiens devant la chapelle. Il a demandé à l’infirmière qu’est-ce qui se passait, l’infirmière de lui répondre : « C’est la fête de la Vierge Marie » et il a tourné les yeux vers le ciel et il a dit : « Vierge Marie maman, aujourd’hui qui est jour de ta grande fête, moi ton fils petit Robert, j’ai le corps pourri par les blessures… Tout ce que j’ai de plus cher à te donner, tout ce qui me reste et que je te donne de plus cher, ce sont mes yeux. » Ce qui m’a marqué, c’est qu’il paraît que 15 minutes après cette conversation de Robert à travers sa prière à la Vierge Marie, il a perdu la vue. Ça c’est un signe fort… c’est un signe fort pour moi qui m’encourage à être certain que Robert était en connexion directe avec le ciel. Il a donné avec joie ses yeux et la Vierge Marie a pris.
Dans mon cœur, j’ai commencé le chemin de croix avec Robert, je ressentais cette conviction, cette confiance que Robert est une bonne courroie de transmission entre le Seigneur et moi, entre la Vierge Marie également et moi.